Jan 26

Culture du management

L’ancienne Chine savait déjà qu’il est préférable d’apprendre à pêcher plutôt que de recevoir du poisson, et que la connaissance des moyens est bien plus précieuse que l’obtention du résultat. Cette conviction est un point de départ intéressant pour toutes les démarches de conseil en management et communication, puisque la conduite d’une équipe repose avant tout, non sur l’art de la pêche bien entendu, mais sur la capacité à juger et à discerner dans la complexité des situations de travail.

Une méthode de conseil en Ressources Humaines a donc une nécessaire portée culturelle capable de nourrir le jugement et le discernement des managers. Etant donné la complexité des situations de travail auxquelles les consultants sont confrontés, résoudre un conflit ou remotiver une équipe revient par exemple à donner du poisson sans apprendre à pêcher. C’est au contraire la culture du manager qui permet de garantir la qualité du climat de travail sur le long terme.

Une activité de conseil consiste donc aussi à transmettre une certaine culture de l’humain, une intelligence relationnelle et comportementale qui est le principal moyen de la performance managériale. Comme l’art de la pêche, c’est cette culture du management qui permet à ceux que l’on accompagne d’être véritablement autonomes et actifs dans leurs démarches.

Malheureusement, cette culture du jugement et du discernement ne souscrit pas du tout à cette véritable superstition du résultat immédiat et mesurable, qui tend à tout nous faire concevoir sur le mode technologique de la reproduction d’un process. Si le manager ou le consultant parviennent à « attraper du poisson », leur art ne consiste pas seulement en la simple reproduction automatique de procédures techniques et d’outils. La connaissance du terrain montre au contraire qu’ils utilisent leurs techniques avec un discernement qu’il serait fort difficile de réduire à un process.

Le discernement et l’art de juger sont effectivement indispensables à la relation humaine, et impliquent une culture qui dépasse la question technologique. La mission de conseil doit donc impérativement ajouter à la technique du management une culture de l’humain qui permettra de faire en sorte qu’un certain savoir-être soutienne et encadre les savoir-faire. Au travers des relations, comportements, ressentis et manières de communiquer, l’intelligence et le discernement constituent cette valeur ajoutée que l’on peut effectivement comprendre comme une culture ou un savoir-être, et que toute collaboration, qu’elle soit économique ou purement humaine, pose d’emblée comme la condition de son efficacité.

Le conseil consiste donc aussi à vendre de l’intelligence, une intelligence que l’on conçoit spontanément en termes de culture lorsqu’elle implique un certain savoir-être. Or si les ouvrages font amplement état de techniques et d’outils de management, peu s’intéressent vraiment à cette culture sans laquelle on ne fait que reproduire sans discernement… et sans succès ! Si cette reproduction passive tient de prévisibles promesses lorsqu’elle se porte sur une matière purement technique, elle conduit au contraire à de véritables catastrophes quand elle s’applique aux Ressources Humaines…

C’est pourquoi une bonne méthode de conseil ne peut pas négliger cette part de culture qui éclaire les savoir-faire, et de renouer avec ce qui caractérise finalement une véritable civilisation. Sans culture en effet, et en dépit de tous les savoir-faire imaginables, la barbarie est toujours déjà-là. La barbarie dans les organisations, c’est effectivement un management formel qui envisage le personnel comme une matière inerte sans égard pour son besoin de sens, de reconnaissance, de soutien et d’autonomie. Cet égarement technicien condamne toute efficacité à moyen terme, et par manque de culture humaine, compromet les performances par l’exclusive attention qu’il a voulu y porter. C’est alors que s’engage souvent, et par la force des choses, un véritable travail de culture… Dire que l’on « se connait bien » et que l’on « sait comment on fonctionne », est l’expression empirique et improvisée de cette culture humaine, et suffit certes parfois à la santé de l’entreprise. Mais au-delà d’un certain nombre de collaborateurs, ou suite à une passif historique difficile, cette culture spontanée et en quelque sorte minimale ne suffit plus à maintenir le contrat moral de collaboration… Elle doit être renforcée par une approche plus professionnelle et mieux maîtrisée.

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