Août 30

Le conseil en action

La nécessité d’améliorer le climat relationnel des entreprises, et partant de ses performances managériales, pose d’emblée la question de ce qu’il conviendrait de faire, des recommandations et plans d’actions susceptibles de changer les choses. Cette visée pragmatique, justifiée il est vrai par les impératifs de performance qui enserrent l’entreprise, mettent un très fort accent sur les « marches à suivre ». On nous reproche parfois – comme une sorte de vestige de notre prime formation scientifique – de consacrer un peu trop de temps à l’analyse, nous faisant aussi remarquer que bien des pages disent « ce qu’il en est » sans encore évoquer « ce qu’il faut faire ». Ce primat du « faire » est le propre des hommes d’action qui sont nos interlocuteurs, mais il renferme aussi un danger majeur, qui est celui d’oublier que la qualité des démarches entreprises dépend entièrement de leur pertinence et opportunité au regard d’un contexte particulier. Or seule une analyse préalable peut saisir ce premier maillon du succès.
Conjointement à la question « que dois-je faire ? », le porteur de projet gagne donc à se demander « qu’est ce qui doit faire », c’est-à-dire laquelle de ses facultés sera le meilleur agent de ses actions. Cette faculté est l’intelligence – ou en termes plus classiques la prudence ou l’art de juger – car nul ne peut savoir quoi faire avant d’avoir saisi et analysé tous les paramètres de la situation qu’il entreprend de réformer.
Décider implique donc une forme d’introspection, cette sorte de contemplation qui est l’antique complément de l’action, et à laquelle notre civilisation de l’agir réserve rarement le traitement qu’elle mérite. C’est de toute façon l’intelligence qui précède tout, qui doit finalement trôner du haut de la citadelle de nos compétences. Comme le rappelait Henry Poincaré, il y a certes « dans l’homme d’autres forces que son intelligence, personne n’a jamais été assez fou pour le nier. Ces forces aveugles, le premier venu les fait agir ou les laisse agir ; le philosophe doit en parler ; pour en parler, il doit en connaître le peu qu’on en peut connaître, il doit donc les regarder agir. Comment ? avec quels yeux ? sinon avec son intelligence. » [La valeur de la science, Paris, Flammarion, coll. Champs, 1970, p. 153]. Evitons que « le philosophe » n’entre en scène et plaçons le manager au cœur de cette citation, nous réunissons alors les meilleures conditions de la  performance et du changement.

00 commentaire

Vous souhaitez laisser un commentaire ?

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *